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Moi, je sais d'où souffle le vent. Ecrits sur la danse.
26 mai 2024

Erik N/ Le Danseur. Partie 2. Les USA, New York et une grande compagnie de danse.

 

1. Un danseur danois à Manhattan.

Erik Anderson a atteint son objectif : il va travailler pour une des meilleurs compagnies de danse du monde, le New York city ballet. C'est la maison de Balanchine et de Jerome Robbins. De ce point de vue, il est heureux mais Julian Barney, qui l'accueille, le met mal à l'aise en voulant faire de lui son compagnon attitré.

Au début du mois d''octobre 1984, Erik prit l'avion pour New York et Julian vint le chercher à l'aéroport Kennedy.  Radieux pendant tout son voyage, il se sentit mal à l'aise quand il posa le pied sur le territoire américain.  Les coups de fil que Julian et lui n’avaient cessé d'échanger et les lettres qu'ils s'étaient écrites l'avaient galvanisé. Mais plus l’échéance du départ avait été proche, plus il avait été heureux que le contrat qu'il finissait de remplir au Danemark lui  permette de gagner du temps. Ce face à face avec cet homme, il le redoutait. Maintenant, il était arrivé aux États-Unis et dans le hall de l'aérogare, il se dit content et très joyeux. Julian perçut sa gêne mais ne fit pas de commentaire. On était en automne, il le lui dit. Il faisait déjà froid et dans ces cas-là les sentiments qu'on veut exprimer sont comme filtrés. La rigueur des températures les aide à ne pas trop se montrer. Cette façon d’expliquer sa réserve rendit Erik perplexe mais son ami lui adressa un sourire bienveillant. Il comprenait, bien sûr, qu’Erik fût sur le qui-vive et il appréciait de le voir ainsi : le bel embarras d'un jeune homme est toujours un spectacle de choix. Il pensait à ces après-midis tendres où Erik et lui, entre de longues errances, s'étaient contemplés et étreints à l'hôtel au Danemark. Ces longs cils blonds sur ces paupières closes, ce buste imberbe, ces épaules fermes, il les retrouvait ou du moins, les appréhendait. Un peu de route, des paroles encourageantes et du savoir-faire et il les retrouverait. Il exultait. Ce beau jeune homme blond, depuis longtemps, embrasait ses sens. Il l'avait toujours attendu. Beau, fin, racé, intelligent et danseur classique. Pas n'importe lequel. Il l'aida à récupérer ses bagages et le guida vers le parking. L'aéroport était distant de la ville. Le temps était gris. Il tombait de la neige gelée et la circulation était dense. Comme le jeune homme restait silencieux, il dit :

-Je suis très content, tu sais.

-Moi-aussi.

-C’est déstabilisant pour toi…

-Non, pas du tout. Je suis content de te voir, moi-aussi.

-Sens-toi libre. Tu peux être sincère !

-Bien sûr. Je suis sincère.

Cependant, il le voyait bien, le beau Danois se raidissait et il n'était pas encore temps de lui parler de ses abandons et de ses gémissements dans l'amour physique. Les kilomètres défilaient et de temps à autre, le décorateur croisait le regard bleu du danseur où il lisait la réserve tout autant que le ravissement. Cet engagement qu'il avait obtenu dans un lieu prestigieux témoignait de sa valeur. En même temps, il était craintif mais Julian était assez sagace pour voir qu’on ne lui prendrait rien sur cette scène où s'étaient succédé de très grands danseurs. Déjà, il se défendait contre le doute et cette défense obstinée s'étendait à lui

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